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Aujourd’hui nous signons le papier de sortie d’hôpital de notre fils ! J’ai été surpris car tout est allé très rapidement. Un peu plus de vingt-quatre heures et tout change.

Dans un premier temps, les médecins pensaient rapatrier Marceau à l’hôpital de Liège pour prendre le relais. L’hôpital du MontLégia est un tout nouveau bâtiment qui vient de sortir de terre avec de très bonnes équipes.

Ceci pose plusieurs interrogations : quel type de transport ? L'hélicoptère n’est pas forcément le mieux pour son poumon. Avec une ambulance, ce sera trop long et trop risqué. Il ne faut pas oublier non plus l’évolution du Covid-19 dans notre région. Liège est alors une des villes les plus touchées à cette période. Nous devons tous éviter d’attraper ce virus.

Finalement, les médecins se mettent d’accord avec nous pour que nous restions dans le coin afin qu’ils assurent eux-mêmes le suivi pendant les dix prochains jours. Marceau résidera dans une chambre d’hôtel proche de l’hôpital.

Marie a trouvé un hôtel pas cher. La dame de l’hôtel nous fait même un prix et nous propose de nous organiser nous-mêmes pour limiter les frais. Nous apprécions, car le budget familial doit être particulièrement maîtrisé, notamment en cette période.

Avant de quitter l’hôpital, Marceau va dire au revoir aux équipes de réanimation. Le médecin qui s’est occupé de lui dès son arrivée est heureux de le voir sortir. Il lui demande d’envoyer un mail de nouvelles dans les mois qui viennent. Notre fils est fier de se tenir debout devant cette équipe qui s’est tenue à ses côtés plusieurs jours. Il s’est dit : « En sortant, je veux me tenir debout devant ce docteur qui m’a aidé. »

Nous voilà arrivés à l’hôtel. Marceau doit marcher dix minutes, trois fois par jour, et faire des exercices respiratoires. Mais il a du mal. L’infirmière libérale qui s’occupe de Pascal, mon beau-père, va soigner notre fils en respectant un protocole de soins. On se retrouve avec plusieurs sacs de médicaments dans la chambre. Dehors, la température est caniculaire. Heureusement, notre chambre est située dans un ancien bâtiment en pierres, ce qui rend la pièce agréable. Dehors, il y a la piscine, mais la baignade est interdite pour lui. Je vous avoue que pour moi, ça me fait du bien de piquer une tête. C’est un temps de ressourcement, une page qui se tourne.

L’heure de faire le bilan

Je suis seul à faire quelques longueurs dans la piscine, ce qui m’aide maintenant à penser un peu plus à moi. À ce moment-là, je réalise que je passe parfois à côté de choses bien essentielles. Pendant des années, j’ai donné la priorité aux autres, à mon travail, aux urgences sociales qui, en soi, auraient pu attendre le lendemain. C’est comme ça !

J’aime aider les personnes dans le besoin. Mais voilà, en ces instants, je ne peux plus voir la vie comme avant. Je réalise que je devrai faire à l’avenir des choix dans les priorités de mon quotidien.

Même si j’ai toujours été présent pour les membres de ma famille, trop souvent ils ont dû subir mes absences. Je réalise l’importance de ma famille et qu’elle a véritablement besoin de moi. C’est difficile de réaliser ces choses, de les admettre et de prendre l’initiative de changer le quotidien.

C’est vrai que c’est bien moi qui ai appris à mes enfants à faire du vélo, du ski, de la natation… mais malgré toute cette présence, je réalise qu’il me faut aujourd’hui donner la première place à ma famille. Elle ne devra plus être obligée de suivre et de supporter mes « urgences sociales ».

C’est bien dommage qu’il faille des circonstances comme cette expérience pour réaliser ces choses. Je suis seul à faire ce bilan et à présenter mes observations au Seigneur. Je réalise aussi que ces bonnes dispositions resteront un rêve et que mes désirs de changement s’évanouiront si je ne me laisse pas transformer par Dieu. Nous avons beaucoup de bonnes intentions, surtout le 1er janvier. Mais en réalité, peu se réalisent véritablement.

Je ne suis pas dans une démarche culpabilisante car je sais que je peux compter sur l’aide divine. Je sens vraiment le Seigneur m’aider dans ce choix de vie nouvelle. J’apprécie la vie autrement, surtout ce temps que nous passons ensemble.

Avec la crise sanitaire, l’hôtel est presque vide. Il y a très peu de touristes et ça nous convient bien. Calme et repos au programme. Le soir, nous sommes autorisés à aller voir la famille. Du coup, nous allons manger chez mes beaux-parents en respectant les consignes sanitaires de l’époque. Les retrouvailles sont formidables.

Je me rappelle cette fois où Marceau a pu se rendre en fauteuil dehors pour dire bonjour à ses grands-parents. Le médecin avait impulsé cette idée pour le moral de notre fils. Nous avions convenu d’une surprise ce jour-là. Tout était prêt. Ma belle-sœur, ses deux enfants et mes beaux-parents sont sur la terrasse en bas. Nous sortons Marceau un peu de force de sa chambre car, ce matin-là, il n’avait vraiment pas envie de bouger. Son moral évoluait comme un véritable yo-yo. Arrivé en bas, il aperçoit la famille. C’est un véritable cocktail de larmes, de sourires et de joie. Que la vie est précieuse et agréable à saisir dans ces occasions ! Malgré la distance sociale requise et le port du masque, il se dégage alors une émotion inoubliable. Les mots ont du mal à sortir, mais les regards disent tout ce qui est ressenti à l’instant présent.

Tout émus, sans rien dire, les petits offrent leurs dessins. Marceau prend la parole pour parler à son grand-père, atteint depuis quelques années de la maladie de Parkinson, et qui se bat chaque jour contre ses douleurs. Mais, ce matin, il est là, présent pour entendre son petit-fils. Marceau lui dit : « Papou, franchement je suis fier de toi, je te félicite. Avec mon accident, je sais ce que c’est que de rester allongé, bloqué pendant des jours à regarder le plafond. Je sais ce que tu éprouves chaque jour car je suis passé par là. Tu es vraiment un grand-père courageux et je ne te verrai plus comme avant. Je te comprends, je sais ce que tu peux ressentir. Je suis fier d’avoir un grand-père comme toi. Je t’aime Papou et j’aime toute ma famille. »

Son grand-père se redresse avec ses faibles forces, s’appuie sur sa canne, ses lèvres tremblent. Un grand-père de cette génération, ça ne pleure pas. Mais là, les paroles de ce gamin de quinze ans touchent nos cœurs emplis d’une émotion incontrôlable. Ces quelques minutes de rencontre resteront dans nos mémoires. Marceau sait trouver les paroles fortes qui ont du sens.

Encore une petite histoire avant de conclure. Nous sommes sur le parking, dans la voiture en train de quitter l’hôpital pour nous rendre à l’hôtel. Marceau nous dit deux choses. La première, c’est qu’il nous remercie, Marie et moi, de notre présence quotidienne. Il nous dit que sans nous, il aurait voulu tout abandonner de la vie, mais que notre soutien lui a donné la force de se battre. Il nous dit avoir les meilleurs parents de ce monde. Désolé pour les autres… Ensuite, il continue en nous disant : « J’ai quelque chose à vous dire qui vous semblera étrange, mais si je devais repasser par cette épreuve, je le referais. Même avec les douleurs, parce que, pendant les moments difficiles, j’ai vécu une expérience avec Dieu qui reste exceptionnelle. Bon, la douleur je m’en passerais bien, mais j’ai tellement senti la présence de Dieu. »

Je vous laisse imaginer ce que ce partage a provoqué comme émotion. Je me mets alors à penser à quelques paroles de la Bible que voici :

« Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne crains pas car tu es avec moi(1). »

« Mon corps et mon cœur peuvent s’épuiser, Dieu sera toujours le rocher de mon cœur et ma bonne part(2). »

Jésus qui dit : « Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse. Aussi, je me montrerai bien plus volontiers fier de mes faiblesses afin que la puissance de Christ repose sur moi(3). »

Dieu qui dit : « N’aie pas peur, car je suis moi-même avec toi. Ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu. Je te fortifie, je viens à ton secours(4). »

Nous sommes heureux de voir comment Marceau a su inviter Dieu dans son combat. Lui qui chaque jour disait dans ses faibles forces : « Dieu est là » ou encore « Confiance Dieu. »

De retour vers l’hôtel, nous passons devant ce fameux radar qui nous rappelle le chant anglais de Marie et surtout ce fameux Psaumes 41.4 : « Je le soutiens sur son lit de douleur. » Quel beau nouveau clin d’œil ! Comme le disait William Booth, fondateur de l’Armée du Salut : « Les promesses de Dieu sont certaines, mais il faut y croire. »

Retour en Belgique

Il est maintenant temps de rentrer à la maison. Les choses s’organisent et nous sommes heureux de retrouver notre quotidien.

Le 13 août, Marie et Marceau arrivent à la gare de Liège. Il est à peine plus de 22 h 00. La veille, le chirurgien nous a dit que Marceau pourrait rester sous notre surveillance à la maison. Son état ne nécessite pas d’hospitalisation. Nous n’aurons que quelques rendez-vous avec le spécialiste ici en Belgique. Le kiné de la famille passe tous les jours. L’évolution est manifeste de jour en jour. Les semaines passent et nous voilà à la période de la rentrée scolaire. Marceau pourra reprendre les cours fin septembre, quelques heures, car il ne peut pas rester sur une chaise trop longtemps. Il espère reprendre le basket bientôt alors que les médecins ne pensaient pas cela possible avant plusieurs mois. Qui l’aurait imaginé ?

Début octobre, le spécialiste informe Marceau qu’il pourra reprendre les entraînements sans contact plus tôt que prévu. Il participera aux entraînements dans sa nouvelle équipe. Mais rapidement, ceux-ci seront arrêtés à la suite de la hausse inquiétante du coronavirus. Le 19 novembre, le spécialiste nous reçoit après la radio. Marceau est officiellement guéri et peut reprendre ses activités comme avant.

Bien entendu, il continue à ce jour les séances de kiné le temps que ses muscles et ses nerfs retrouvent pleinement leurs fonctions. Mais le médecin nous informe qu’il n’y a plus aucune trace, ni sur le poumon, ni sur la côte. Il nous signale que des douleurs peuvent encore surgir pendant un an, mais qu’il n’y a rien d’anormal. Marceau doit se remuscler, reprendre ses activités et continuer sa vie.

Conclusion

Cette expérience nous a tous transformés. Le jour où nous sortions de l’hôpital, sur le parking, Marceau nous disait : « Papa, maman, laissez-moi regarder encore une fois. Silence radio. » Et Marceau de continuer : « Vous savez comme j’ai eu mal, mais si c’était à refaire, je le referais car j’ai vécu une histoire formidable avec la présence de Dieu. » Nous étions tous en larmes dans la voiture.

Quelque temps plus tard, Marceau a été suivi par de bons médecins en Belgique. Il est rentré fin octobre à l’école, mais seulement le matin. Tenir assis sur le banc de sa classe lui était insupportable. Six mois plus tard, il recommençait à courir un peu et reprenait l'entraînement de basket sans contact. Aujourd’hui, il a repris le basket sans condition et tout est rentré parfaitement dans l’ordre.

Je tiens à remercier chaque personne qui, d’une manière ou d’une autre, s’est montrée présente durant notre combat.

Je retiendrai une seule phrase de cette expérience qui a été pour moi la Parole révélée de Dieu, un soir de juillet 2020 sur le parking des urgences de Carpentras : « L'Éternel le soutient sur son lit de douleur. »

Auteurs
Michaël DRUART

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Ésaïe 41.10.

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